jeudi, 20 décembre 2007

POLLUTION AU MERCURE : une urgence planétaire !

L'effet toxique du mercure sur la santé est connu depuis longtemps, notamment avec le cas maintes fois cité de la baie de Minamata au Japon où, dans les années 50, des centaines de personnes sont mortes après avoir mangé des poissons pollués au mercure. Mais ce n'est que tout récemment que la mise en place d'un traité international visant à réduire les concentrations en mercure dans l'environnement a été envisagée.

Vers un traité international

Du 12 au 17 novembre 2007, sous l'égide du Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE), s'est tenue à Bangkok une conférence internationale sur le mercure. Achim Steiner, directeur du PNUE, annonce alors que des mesures mondiales pour la réduction des rejets de mercure dans l'environnement s'imposent.

Une centrale électrique à charbon dans les alentours de Pékin : De nombreux habitants vivent à proximité des tours de refroidissement d'une centrale électrique au charbon dans la banlieue de Pékin.
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Une centrale électrique à charbon dans les alentours de Pékin

Depuis la pollution de Minamata dans les années 1950, aucun accord n'avait été envisagé au niveau mondial pour limiter les rejets de mercure. Alors pourquoi cette brusque accélération ? Le constat est simple. Dans un document intitulé « Evaluation mondiale du mercure » datant de décembre 2002, le PNUE remarque que la pollution au mercure est principalement due aux rejets atmosphériques.

La Chine est pointée du doigt : 70% de ses besoins énergétiques sont fournis par le charbon et utilisent le mercure dans son processus de fabrication. En pleine croissance, elle construit de plus en plus de centrales à charbon, les rejets atmosphériques en mercure augmentent donc en parallèle.

Des avis partagés

Thermomètres, baromètres, manomètres, amalgames dentaires, ampoules basse consommation, le mercure est partout. Outre le charbon, il est utilisé dans le processus de fabrication du PVC, dans la production de chlore ou d'extraction d'or et d'argent. La réduction des rejets de mercure dans l'environnement passe par son remplacement par des composés moins toxiques ou par l'utilisation de procédés industriels alternatifs. L'Union européenne, la Norvège, la Suisse, le Japon, le Brésil, les pays arabes et africains appellent à l'adoption prochaine d'une réglementation.

Elena Lymberidi, chargée de campagne ZeroMercury au sein du Bureau européen de l'environnement

Elena Lymberidi, chargée de campagne ZeroMercury au sein du Bureau européen de l'environnement

Les pays africains sont particulièrement sensibles à l'impact des déchets mercurés sur la santé des populations, déchets qu'ils acceptent sur leur sol pour des raisons économiques. Ils attendent avec impatience qu'un traité incite au remplacement du mercure par des composés moins toxiques.

Elena Lymberidi, chargée de campagne ZeroMercury au sein du Bureau européen de l'environnement, insiste : « Les Etats-Unis, la Chine, l'Inde, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ne veulent pas de traité. » Beaucoup de thermomètres, baromètres sont fabriqués en Chine ou en Inde pour être exportés vers l'Europe et les pays en développement. Et la chargée de campagne de regretter : « L'Inde ne participait pas à la conférence de Bangkok et les Etats-Unis bloquent bon nombre de traités et de conventions relatives à l'environnement. »

Pour aboutir à l'élimination des produits à base de mercure d'ici à 2020, le PNUE envisage soit le renforcement de la Convention de Stockholm*, soit la mise en place d'un nouveau traité. Rendez-vous est donc pris lors de la prochaine réunion du PNUE à l'automne 2008.

* Convention de Stockholm : accord international signé en 2001 visant à interdire les polluants organiques persistants (les POP), particulièrement toxiques, se dégradant faiblement dans l'environnement et s'accumulant dans les organismes vivants.

Un enjeu pour l'Europe

Au niveau européen, la réglementation est en pleine évolution avec l'adoption en septembre 2007 d'une nouvelle directive (Directive 2007/51/EC) visant à éliminer certains instruments de mesure utilisant du mercure tels que les thermomètres d'appartement et les baromètres. Cette nouvelle directive devra être transposée dans chaque pays européen d'ici à avril 2009.

Petite boule de mercure dans un bocal
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Petite boule de mercure dans un bocal

La France, quant à elle, réglemente l'utilisation des thermomètres au mercure depuis déjà dix ans. Même si au niveau européen la volonté de bannir le mercure de l'environnement est réelle, la contamination est parfois plus difficile à contrôler : la pollution atmosphérique ne s'arrête pas aux frontières.

Ainsi, dans un récent rapport du RIVM (Agence néerlandaise de l'environnement), J. Slootweg et al (2007)* constatent que les dépôts atmosphériques de mercure touchent 42 à 77% des écosystèmes européens. L'étude qui porte aussi sur le cadmium et le plomb, autres métaux lourds, montre que les pays de l'est et du nord de l'Europe (Suède, Finlande et pays Baltes) sont particulièrement exposés aux dépôts de mercure atmosphériques.

La précédente étude datant de 2005, concluait que 50% de ces écosystèmes étaient touchés. La dégradation de la situation confirme donc l'urgente nécessité d'une réglementation au niveau mondial pour la réduction des émissions de mercure.

* European Critical Loads of Cadmium, Lead, Mercury and their exceedances, Water Air Soil Pollution, Focus 7 : 371-37.

Geneviève De Lacour

http://www.cite-sciences.fr/francais/ala_cite/science_actualites/sitesactu/question_actu.php?id_article=9023&langue=fr

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